EL CAMINO

   Après le village, il y a un chemin qui parcourt la campagne. Ce chemin est extraordinaire. Il est fait de graviers gris bleu sur une poussière beige. À ses côtés, des herbes jaune soleil parsemées de petites graines. On dirait des pinceaux. Ces herbes sont de l’avoine. Elles sont fines. Elles sont parfaitement droites. Elles courbent légèrement sur la douceur du vent qui parcourt la plaine. L’avoine a poussé dans de l’herbe verte, un vert intense. Le contraste du jaune et du vert donne une grande profondeur au paysage qui défile sous mes yeux. À ma droite, un grand champ de blé. Il est prêt pour la moisson. Il y a des coquelicots, des trompettes blanches, des fleurs violettes et des boutons-d’or qui se sont rassemblés à la lisière de la plaine dorée. À ma gauche, c’est un champ moissonné. De la paille, parfaitement rectiligne, a séché au soleil. Elle devra être rassemblée pour être engrangée. La taille franche au ras du sol ressemble à un immense tapis ou le paillasson de la porte d’entrée d’un monde magique.

   Ce monde est inhabité. Je suis seul à marcher dans cette plaine. De légères collines ondulent à l’horizon sous un soleil rempli de nuages blancs étalés sur une surface bleu plus profond que l’infini. Perdu dans cette immensité, je me retourne. Je vois une distance infinie derrière moi. Elle est identique à celle que je poursuis depuis les heures matinales. Le jeu des couleurs est parfait. Il est bronze. Il est or. Il est la terre de Sienne. Il est pastel. Il est peut-être la plus belle peinture que j’ai traversée dans ma vie.

Michael WOLKOF
Nájera – Santo Domingo de la Calzada